« Je garantirai les moyens de la Justice » Anne Hidalgo

 

Garantir l'indépendance de la justice

Si les juges du siège bénéficient d’une indépendance statutaire et de gestion, les magistrats du Parquet peuvent encore faire l’objet d’une nomination discrétionnaire par le pouvoir politique. De fait, l’indépendance de toutes les composantes de la Justice n’est pas acquise.

Certes, la plupart des gardes des Sceaux suivent les avis du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Toutefois, sous le quinquennat de Jacques Chirac, les ministres successifs passèrent outrent l’avis du CSM à de nombreuses reprises. Sous celui de Nicolas Sarkozy, la ministre s’estimait « chef des procureurs », la Chancellerie convoquait même des magistrats du parquet. Emmanuel Macron, qui a fortement présidentialisé les nominations, a bousculé lui aussi la coutume sans aller jusqu’au passer outre. Conscient de cette fragilité, François Hollande avait initié un projet de révision constitutionnelle qui n’a pu aboutir. 

Un statu quo n’est pas acceptable aujourd’hui quand il s’agit d’affirmer des principes démocratiques fondamentaux.

 

Réviser la constitution pour garantir l'indépendance de l'autorité judiciaire 

Nous présenteront un projet de révision constitutionnelle pour réécrire les deux premiers alinéas de l'article 64 de la Constitution, et ainsi garantir l'indépendance de la justice, lesquels disposent que « le président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire » et qu'« il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature ». L'actuelle formulation répond mal aux exigences de la séparation des pouvoirs. Le Président de la République n’a pas d’attribution spécifique en la matière et le CSM ne saurait constituer son supplétif.

Nous proposons de :  

  • reconnaitre le CSM comme « garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire »
  • renouveler la composition du CSM afin d'assurer la parité entre magistrats et non-magistrats et d'autoriser l'élection comme président d'un membre issu indistinctement de ces deux collèges.
  • conséquence logique de cette évolution, les entités chargées de la gestion du corps au sein de la Direction des services judiciaires (DSJ) seraient transférées au CSM afin que l’instance ait les moyens d’effectuer la pleine gestion administrative du corps.
  • l’Ecole nationale de la magistrature pourrait, elle aussi, être rattachée au CSM.
  • une partie des inspecteurs de la Justice devraient aussi être rattachés au CSM. Par ce biais, le CSM aurait les moyens d’exercer la plénitude de ses compétences.

Naturellement, ces dispositions justifieraient que le CSM émette des avis sur les sujets relevant de sa compétence et que notamment ils soient obligatoires en matière budgétaire et de gestion administrative.

La Présidente de la République conserverait toutefois une obligation constitutionnelle majeure, qui découle de l’article 5 de la Constitution, lequel lui confie le soin d’assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics. En matière de justice, de cette prérogative doit faire l’objet d’un usage déterminé pour lutter contre toutes les attaques que subissent la Justice et les magistrats. Ainsi le Garde des Sceaux devra systématiquement déposer plainte lorsque cela est possible

Par ailleurs, nul texte législatif ne viendra placer l’acte juridictionnel dans le domaine du disciplinaire.

 

Accroire les effectifs, le budget et le financement de notre Justice

 

Augmenter le budget du ministère de la Justice

Toutes les décisions nécessaires seront prises pour procéder à un accroissement très conséquent du budget du ministère de la Justice afin de le porter à 10 milliards d'euros. Ce chiffre tient compte à la fois des besoins repérés et d’une comparaison internationale.

En effet, le dernier rapport d’évaluation de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice montre qu'en 2018, la France a dépensé 69,50 euros par habitant pour la justice judiciaire, soit : 

  • un niveau inférieur à la moyenne des quarante-sept États membres de l’organisation : 71,50 euros
  • encore plus inférieur avec les pays ayant un produit intérieur brut par habitant similaire : 131,20 euros par habitant pour l’Allemagne, 92,60 euros pour l’Espagne, 83,70 euros pour le Belgique et 83,17 euros pour l’Italie.

 

Recruter d'avantage de magistrats

Grâce à ce budget revalorisé, nous procéderons au recrutement de 3000 magistrats pour atteindre le nombre de 12000. Nous œuvrerons à l’attractivité du recrutement en procédant à la juste rémunération des magistrats.

De telles mesure permettront de répartir la charge de travail qui est devenue démesurée, et donc de diminuer les délais qui s'avèrent aujourd'hui déraisonnables et rompent la confiance des citoyens dans leur Justice.

 

Travailler à la formation et l'attractivité des métiers

Cela supposera évidemment d'adapter l'outil de formation en créant un grand campus du droit à Bordeaux et dans sa région afin de supporter cet effort.

De même, il est indispensable de rendre plus attractive la filière des greffes et de réduire les vacances de poste. Il faudra donc recruter massivement pour combler les vacances de poste mais également accroître le nombre de personnels de greffe.

 

Garantir un meilleur environnement de travail

Il faut également améliorer l'environnement de travail des magistrats, notamment numérique. Comment comprendre que la Justice ait dû s'arrêter lors du premier confinement ? Aurait-on accepté cela d'autres services publics ? Un plan d'urgence est nécessaire comme le rappelle la Cour des Comptes dans son très récent avis !

 

Permettre aux juges de se recentrer sur leur office primordial

Nous permettrons aux juges de se concentrer sur leur office primordial : trancher les litiges. Quelle est sa plus-value lorsqu’il traite des dizaines d’injonctions de payer pour lesquelles un comptable serait plus qualifié ? Le mouvement de déjudiciarisation, comme pour le divorce sans juge ou une partie du contentieux routier, doit s’amplifier après une concertation avec l’ensemble des magistrats.

 

Il devient impérieux de stabiliser le cadre juridique face à l'incontinence législative qui ne répond qu’à l’émotion médiatique mais qui déstabilise les magistrats dans leur travail quotidien. Nous n'avons plus besoin de lois pénales, nous avons besoin de les voir appliquées. Le quinquennat d’Anne Hidalgo sera celui de la sobriété législative en matière de justice.

 

Proposer une nouvelle organisation de la Justice

La réforme de la carte judiciaire impulsée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy a été traumatique dans la mesure où elle était guidée par une recherche d’économies. Elle a, en outre, laissé subsister des incohérences administratives qui peuvent s’avérer préjudiciables.

Une concertation sera lancée dès le début du quinquennat avec les chefs de juridictions afin d’envisager une mise en cohérence avec les découpages administratifs régionaux. Le même effort devra d’ailleurs être conduit avec les directions interrégionales des services pénitentiaires.

Mais aucune juridiction ne sera fermée car cela serait préjudiciable à l’œuvre de justice, aux magistrats mais également aux habitants de ces territoires qui voient se déliter la présence de la République.

 

Retrouvez également mes propositions sur l'indépendance de la justice ainsi que celles pour garantir une République qui assure la justice, l'État de droit et la sécurité.